Claude Agent Skills : la fonctionnalité qui change tout ?

Le 16 octobre 2025, Anthropic a lancé les Claude Skills. Cette fonctionnalité permet d'expliquer au LLM comment réaliser des tâches complexes, via des fichiers Markdown et scripts.

Claude Agent Skills : la fonctionnalité qui change tout ?
Sommaire
En résumé :
  • Les Skills sont des dossiers avec du Markdown et des scripts.
  • Ils se versionnent avec Git et pourraient échapper au vendor lock-in.
  • L'efficacité en tokens surpasse le MCP selon les experts du domaine.
  • Les limites d'usage d'Anthropic freinent l'adoption des Skills.

Claude Skills, c'est quoi ?

Les Skills, c'est une nouvelle fonctionnalité qui sort de chez Anthropic, et qui permet d'améliorer les capacités d'un LLM sur une tâche spécifique. En clair, c'est une sorte de "mini-formation" pour que Claude sache faire une chose en particulier.

Où est-ce qu'on peut s'en servir ?

Partout. Dans l'interface de Claude Web, dans Claude Desktop, les Agents de Claude Code et l'API : Anthropic a déployé ses Skills partout en même temps. Le déploiement a commencé il y a quelques semaines, mais l'annonce officielle date du 16 octobre 2025.

Que peut-on faire avec des Skills ?

C'est le premier point fort : à peu près tout : Les Skills sont des maxi-prompts dédiés à une tâche, que le modèle chargera lorsqu'il en aura besoin.

Par exemple, il existe déjà des Skills, publiés sur le repository officiel d'Anthropic, pour générer des documents PowerPoint directement depuis Claude. Il "suffit" de lui expliquer comment est structuré un PowerPoint, quelle norme suivre, et ça roule. On peut aussi faire un skill pour appliquer une identité graphique.

On sent venir la récursion : il existe déjà un Skill officiel pour expliquer à Claude comment créer des skills efficaces...

Techniquement, à quoi ressemble un Skill ?

Plutôt orienté vers les dévelopeurs dans un premier temps, un Skill, c'est un dossier qui continent à minima un fichier Markdown, SKILL.md, avec quelques métadonnées (en YAML), c'est à dire un simple fichier texte qui suit une norme (facile à apprendre). On peut lui ajouter des sous-prompts (dans des répertoires), des fichiers d'exemple, des bouts de code, etc.

À quoi ressemble le code d'un Claude Skill

Au passage, on comprend mieux pourquoi, depuis quelques semaines, les modèles d'Anthropic ont tendance à créer des fichiers .md pour chaque chose qu'on leur demande de coder : ils se préparaient à cette annonce ;)

Pour en profiter dans l'interface Web, il suffit d'en faire un zip et de l'uploader.

Skills vs MCP

Sur son blog, Simon Willison va très loin : "Cette approche pourrait être plus importante que le MCP lui-même."

Car ce n'est pas la même chose. Le MCP, c'est un protocole qui permet aux LLMs se savoir se brancher sur des outils. Mais quand on veut faire un Agent capable d'exécuter de nombreuses tâches, même avec des sous-agents, ça devient vite compliqué : on a 50 serveurs MCP, chacun exposant 50 outils, on doit rajouter des prompts pour expliquer à l'Agent comment enchaîner les appels, etc.

Dès qu'on arrive à une architecture complexe (avec de nombreux outils), les prompts explicatifs s'allongent, la logique devient vite floue, et l'Agent peut se perdre.

Avec des Skills, on cloisonne : envoyer une relance pour des factures impayées et faire un rapport financier trimestriel, ça passera par les mêmes outils (le CRM de l'entreprise), mais pas dans le même but.

L'avantage des Skills, c'est que le modèle ne charge pas la totalité des prompts : il sait où les trouver, et ira les consulter quand ça sera nécessaire.

Et personne ne nous empêche de combiner les deux approches : les MCP exposent des outils, et les Skills expliquent au modèle comment s'en servir de manière optimale.

Efficacité en tokens : la divulgation progressive

Pour améliorer l'efficience en tokens, Claude utilise trois niveaux de chargement, dans ce qu'on appelle une stratégie de divulgation progressive (progressive disclosure) :

  • Niveau 1 : Claude lit juste le nom et la description de chaque Skill. Il sait ce qui existe, mais ne charge rien d'autre.
  • Niveau 2 : Si vous lui demandez quelque chose qui correspond à un Skill, il lit alors le fichier SKILL.md complet et charge les instructions dans son contexte.
  • Niveau 3 : Pour les tâches complexes, le Skill peut faire référence à des prompts complémentaires, à des scripts ou à des documents. Claude ne les ouvre que si nécessaire.

Cette architecture à trois niveaux est brutalement efficace. Pendant qu'un serveur MCP peut envoyer des milliers de tokens de schémas au démarrage, un Skill reste silencieux jusqu'au moment où vous en avez besoin.

Claude Skills : la progressive disclosure chouchoute la fenêtre de contexte

C'est une des raisons qui font que les Skills pourraient bien devenir un nouveau standard pour étendre les capacités des agents IA.

Skills vs Custom GPTs : le choc des philosophies

La comparaison avec OpenAI est inévitable. D'un côté, vous avez le GPT Builder : une interface conversationnelle où vous décrivez ce que vous voulez, et l'IA configure votre assistant personnalisé. C'est accessible, c'est rapide, c'est séduisant.

De l'autre, vous avez un éditeur de code et un fichier Markdown à écrire vous-même.

Le contraste est violent. Mais il révèle deux visions du futur de l'IA.

  • OpenAI parie sur l'accessibilité. Leur modèle vise les utilisateurs non techniques, le grand public. Vous créez un Custom GPT en quelques clics, vous le partagez sur le GPT Store, vous activez des Actions pour connecter des APIs. Tout est dans l'interface. Rien n'existe en dehors de leur écosystème.
  • Anthropic parie sur l'intégration. Leur modèle vise ceux qui construisent. Vous écrivez un fichier, vous le versionnez, vous l'auditez. Vous pouvez embarquer du code exécutable. Vous gardez le contrôle.

La version d'OpenAI créé de la dépendance, puisque votre Custom GPT vit dans leurs serveurs. Vous ne pouvez pas le récupérer, le migrer, ou le sauvegarder ailleurs qu'en copiant bêtement les instructions dans un document. Tout se fait dans leur interface Web et les GPTs Custom ne sont pas accessibles par une API, donc il est impossible de monter proprement des workflows qui les utilisent sans devoir aller "cliquer sur le bouton".

Puisque chaque Claude Skill est une collection de fichiers simples, un Skill peut très bien être partagé, versionné par Git, audité avec les outils usuels, etc. Si la norme venait à s'imposer, on ne serait plus prisonniers d'une interface propriétaire, et c'est une excellente nouvelle.

Cas d'usage

Malgré ces limitations, certains cas d'usage justifient pleinement l'investissement dans les Skills.

  • Standardisation d'entreprise : Créez un Skill qui applique automatiquement votre charte graphique à tous les documents générés. Que ce soit des présentations, des rapports ou des slides, la cohérence est garantie.
  • Automatisation de code : Développez un Skill qui analyse votre base de code, génère des diagrammes d'architecture, exécute vos linters, ou synthétise les changements Git avant une revue de code. C'est du temps gagné sur les tâches répétitives.
  • Analyse de données ritualisée : Construisez un Skill qui charge vos CSVs, exécute un script de nettoyage, puis génère un rapport formaté selon vos standards. Le flux devient reproductible et auditable.
  • Outillage interactif : Combinez instructions naturelles et scripts pour créer un éditeur d'images qui utilise Pillow, ou un testeur web qui s'appuie sur Playwright. L'IA n'est plus qu'un orchestrateur, le code gère le travail précis.

Le pattern gagnant émerge clairement : les meilleurs Skills combinent du langage naturel pour l'intention et du code pour l'exécution. Le LLM interprète ce que vous voulez, puis le script fait le travail complexe de manière déterministe.

Le pari d'un standard ouvert

La véritable portée des Skills dépasse Claude. Le modèle lui-même (un dossier, du Markdown, des scripts) est d'une simplicité désarmante. Rien n'empêche d'autres modèles ou agents d'adopter cette convention.

Si ce format gagne en popularité, une communauté pourrait émerger. Un registre de Skills couvrant diverses tâches. Un écosystème ouvert et portable de capacités d'agents.

Ce serait la réponse open source au GPT Store fermé d'OpenAI.

Simon Willison le dit clairement : "Le véritable héritage des Skills pourrait être l'introduction d'un modèle architectural puissant et ouvert pour l'extensibilité des agents."

En tant qu'enthousiaste de l'open source et des logiciels libres, je ne peux que saluer le pari d'Anthropic : ne pas créer un écosystème propriétaire verrouillé, mais proposer une convention simple que toute la communauté IA pourrait adopter. Ça déjà fonctionné avec le MCP, que OpenAI comme Google ont immédiatement adopté.

Si ça marche, les Skills ne seront pas juste une fonctionnalité de Claude. Ils deviendront un standard.

Sources documentaires

Didier Sampaolo

Didier Sampaolo

Fondateur / Directeur technique

À lire aussi

Découvrez d'autres articles sur le même sujet

Des systèmes experts au machine learning : Pourquoi l'IA des années 80 a échoué
3 min de lecture

Les systèmes experts des années 80

Les années 80 voient l’essor des systèmes experts, avant une nouvelle désillusion qui mène au deuxième hiver de l’IA.

L’IA des années 70 : quand l’IA traverse son premier hiver
3 min de lecture

L’IA des années 70

Les années 70 sont souvent vues comme une période creuse pour l’IA. En réalité, c’est une décennie paradoxale : un hiver pour les financements, mais aussi le terreau des grandes avancées de la décennie suivante.